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  • Photo du rédacteurMémère

Dernière mise à jour : 3 juin 2023

Je ne sais point si Mémère a installé ses colonies dans quelqu'île déserte du Pacifique Sud ou si elle a repris le flambeau dans quelqu'autre guinguette, mais ce dont je suis sûre, c'est qu'il n'y a pas ici âme humaine qui vive. Inutile d'attendre encore des siècles, j'en profite pour reprendre ce qui m'appartient : ma plume en l'occurrence et le commandement à l'occasion. Et bientôt les lauriers. Adieu veaux vaches cochons couvées, elle reviendra sûrement quand j'aurai des dents... Après un tel abandon, je ne vais pas laisser croupir mon croupion sans patte lever. Mon petit orteil m'a même dit que Mémère aurait été entre-aperçue du côté du Pacifique Sud. Du coup on aurait pu s'attendre à "une bouteille à la mer". Et bien détrompez-vous Messieurs Mesdames, ce sera un putsch militaire. J'ai décidé de déménager le régiment entier dans la maison, ce sera toujours plus confortable que dans ce vieux poulailler décrépit. Non mais tout de même c'est quand même scandaleux toute cette Histoire, on n'est vraiment pas fait pour vivre enfermé... Imaginez-vous, si nous nous mettions à donner tous ensemble de la voix... Quelle cacophonie ! Les humains s'apercevraient enfin que les bêtes sont assurément moins bêtes que les humains... Tout comme ce prénom ridicule dont Mémère m'a affublé... Elle pensait peut-être que, criant au petit jour jusqu'à m'égosiller qu'elle vienne enfin nous ouvrir la porte, je chantais ! Me prenait-elle pour un simple piaf !


Je vous en passe et des meilleures, tout au plus vous survolerais-je l'Etat de ce poulailler délocalisé. Il y a d'abord moi : la number one, dite "le Che", première rebelle, première à la gamelle. Et dont la supériorité ne se justifie que par mon poids. Lourd il est vrai. Vient ensuite la numéro deux dans la hiérarchie : ma soeur jumelle et l'exact opposée de moi, prénommée "Mayonnaise" dite Mayoyo. Ne voilà t-il pas que Madame s'est attribué le rez-de-chaussée avec le petit cabinet de toilette où elle passe le plus clair de son temps à remettre ses dentelles et ses plumes à l'endroit ! Il y a aussi le living-room où la petite d'ornement Nuggets, la numéro trois et ses deux enfants adoptifs issus d'oeufs fécondés offerts suite à une grossesse nerveuse : Betty-Tanguy numéro six et Clément-Clémence numéro six ex-aequo (on ignore encore si c'est fille ou garçon), squattent le canap'. De leurs journées, que font-ils ? Je vous le donne en mille ! Ils regardent "Chicken run" en streaming en boulottant des pizzas aux asticots. Je me demande à quel moment ils vont quitter le nid ces deux grands dadais ! Pendant ce temps Suzanne la Sussex, la numéro quatre, quadrille le potager en long en large et en travers à la recherche de quelque nourriture terrestre. Elle doit sûrement avoir le ver solitaire, celle-là !

Cette hiérarchie sociale propre à tout poulailler ne vous semblera sans doute pas très démocratique mais aura l'immense avantage d'éviter les conflits. Il faut bien que quelqu'un fasse tourner la machine ! Puisque que Mémère n'est plus là pour faire bouillir la marmite ! Je suis bien obligé de monter le guet dans la chambre de Mémère d'où je contrôle les allers-et-venues. Loin des stériles caquetages, j'assure le poste de pilotage. J'ai même investi le bureau à l'heure où je vous écris et je tape sur l'ordi à petits coups de bec bien secs. Au moins pas de poules mouillées dans la maison de Mémère ! J'ai d'ailleurs toute refaite la déco avec moult tableaux à mon effigie. Et puisque je détiens enfin le pouvoir, j'en profite pour changer la période bleue de Mémère dorénavant en période blanche. Et pour la peine je ferais mieux que Mémère en vous offrant deux recettes pour le prix d'une. Une version hiver et une version été pour des oeufs toute l'année.


A moi son cahier et ses recettes bizarroïdes, je suis bien décidé à y laisser ma griffe. Voici donc un ode à ma progéniture non fécondée :


Mes Oeufs cocotte de cocotte en cocotte



C'est une recette sans four pour réduire votre facture d'électricité car il n'y a pas de petites économies. Elle se réalise au bain-marie dans une cocotte (en fonte).


Aillez et beurrez le ramequin. Déposez dans le fond des petits champignons de Paris. Nappez de crème fraiche, une bonne dose. Dans ce petit nid, cassez-y mes oeufs en prenant soin de ne pas faire d'omelette. Parsemez de ciboulette du jardin de Mémère, un peu d'emmental, sel et poivre. Déposez le ramequin dans une cocotte en fonte rempli d'eau. il doit être immergé au trois-quart. Laissez cuire douze minutes à partir de l'ébullition de l'eau et dégustez.






Ma salade César

Disposez dans une assiette blanche un coeur de salade romaine. Hérésie d'aller au supermarché, je préfère une laitue simple et bonne issue du lopin de terre du gars Sergio. Rajoutez des pickles pour l'acidité, des petits croûtons aillés pour le croquant, des anchois pour la salinité, des dés de blancs de mes soeurs (manger ou être manger, that is the question) pour le protéiné, et tel un joyau, des moitiés d'oeufs mollets au sommet en guise de lauriers. Nappez de sauce César maison (pour la recette désolé mais secret du "Che", allez sur Internet, je ne vais quand même pas tout vous mâcher). Et picorez.


Edith


P.S. : cette chronique est dédiée à la mémoire de ma Mayoyo qu'on a retrouvé morte de soif ou de maladie, que sais-je, et à celle de Suzanne, Betty-Tanguy et Clément-Clémence qui se sont fait croquer tous les trois par un renard randonneur. Dans l'état, ne reste plus que la plus grosse et la plus petite. On dirait bien que toute la classe moyenne a disparu.

Vivement que Mémère revienne.




Poulailler's song, Alain Souchon, 1977


  • Photo du rédacteurMémère

Chers enfants,


Je me suis quelque peu absentée, je vous le concède. En bonne routarde qui se respecte, je me suis égarée, « à mille mille de toute terre habitée* », quelque part entre l’océan Indien et Pacifique. Tout aussi pacifique l’objet de ce courrier. Pas un nuage dans l’indigo de votre ciel je vous rassure. Un vrai repos que je n'ai nullement volé… Cette année, fi des Bahamas, j’ai voulu pousser le bouchon un peu plus loin. C'est en suivant les oiseaux migrateurs que j’ai ainsi remonté le ru en face de la guinguette, puis de son meilleur profil la rivière, puis le cours de la Loire le fleuve, enfin la mer, jusqu’à l'Océan…

 

Sur ce coup-ci, je ne vous raconterai point mon voyage. Pas de regrets, il se résume à lui seul dans la recette transcrite ci-après. Pour tout vous dire : ni folles escapades ni grandes ascensions. Si ce n'est retrouver mon Montauban pour faire ce que personne ne peut faire à ma place. Je bouquine, je cuisine, et je piscine. Au moment même où je vous écris, me voici en tongs, en train de siroter un petit Guignolet allongée dans un transat d'où je peux enfin contempler le monde de votre point de vue. Et oui ! On a tous un côté Mémère !!! Je jardine aussi. J'ai besoin de choyer un peu mes invisibles, ceux que je ne peux voir tous ces mois où je suis dans ma cuisine à vous cuisiner. Rien d'extraordinaire, j'ai besoin comme tout un chacun de me retrouver avec moi-même. Bref comme disait Pépin : procéder à ce que j’appelle mon élagage d’hiver. Il consiste naturellement à évacuer les branches enroulées trop serrées pour rendre à l’arbre toute sa lumière et son oxygène. Pour lui permettre l’arrivée au printemps de fleurs toujours plus nombreuses, belles et joyeuses, l’été puis l'automne venus de fruits toujours plus savoureux. Pour mieux vous retrouver et vous régalez toujours plus.



En attendant, ne me trouvez donc ici point ingrate et recevez par la même occasion, il est temps mais jamais trop tard, mes bons voeux réchauffés 2022, lequel rime tout simplement avec ciel bleu, ou vieux, désolé je n’ai pas trouvé mieux, et non ce n'est pas forcément antinomique, et oui j’ai naïvement envie d’y croire. Laissez-moi vous consoler avec une recette d’ici de ce que j’ai mangé à midi. Une soupette pleine pour un moment vide. Pleine de couleurs et d’ingrédients, que vous trouverez facilement chez vous dans les épiceries asiatiques françaises. Revigorante et réconfortante. Elle m’a tout simplement été inspiré par le souvenir d’un petit séjour dans l’Est de la France, que nous avions visité pour se rapprocher de l’aspect extrême-oriental des choses à moindre frais. C’était il n’y a pas si longtemps, j'avais déniché au hasard d’une toute petite rue une gargote colorée qui ne payait pas de mine. Son nom m’avait plu tant il me rappelait celui d’un film : « La papaye verte ». Ne craignez jamais de prendre les chemins de traverse si vous voulez espérer un jour tomber sur une pépite. Une femme (ou deux ?) seule en cuisine y mijotai(en)t des soupes thaïlandaises comme je n’en avais encore jamais mangées, le bol rempli de saveurs débordantes d’herbes aromatiques toutes les plus fraîchement cueillies. La version asiatique de « La Soupette de Mémère » en quelque sorte ;)



Soupette "tom yum"


Soupe Tom Yum
Soupette Tom Yum

Il s'agit du plat national thaïlandais dans le top ten des meilleures soupes du monde ! Yes ! It is.


En thaïlandais :

Tom signifie bouillon.
Yum : salade composée. En effet cette recette est le mariage exact de la soupe et de la salade composée, relevée par une bonne diversité d’herbes aromatiques : tout ce que j’aime en quelque sorte !


INGRÉDIENTS :

Ne vous laissez pas impressionner par la quantité d’ingrédients, c’est le principe même d’une salade composée (version soupe aigre-douce acidulée pleine de peps), et l’exécution en est tout aussi simple.


Temps de préparation : une vingtaine de minutes

Temps de cuisson : une vingtaine de minutes


  • 2l bouillon de volaille

  • 20 crevettes décortiquées et crues, c’est mieux

  • 200 gr de champignons (shitakés,…)

  • Une dizaine de tomates cerises ou à défaut vu la saison une bonne sauce tomate maison en bocal

  • 2 oignons blancs

  • 2 gousses d’ail

  • 2 cuillères à café de sucre

HERBES :

  • un beau bouquet de cette coriandre atomique de mon petit maraîcher préféré

  • 4 tiges de citronnelle en grosses rondelles

  • 1 pouce de galanga ou gingembre tronçonné

  • Quelques de feuilles de citronnier fraîches

EPICES :

  • 2 cuillères à soupe d’huile de sésame

  • 1 petit piment rouge oiseau de Thaïlande ;)

  • 2 cuillères à soupe de sauce de poisson (Nuoc Mam)

  • 1 jus de citron vert


  1. Ciselez et coupez tous les ingrédients. Ôtez les premières feuilles de la citronnelle et frappez les brins avec un petit maillet ou le dos d'un couteau pour libérer les saveurs. Décortiquez les crevettes si elles ne le sont pas déjà.

  2. Faites revenir les oignons et l’ail. Déglacez avec le bouillon de volaille. Portez-le à ébullition avec la citronnelle, le gingembre, les feuilles de citronnier et faites cuire encore 5 minutes.

  3. Ajoutez les tomates, les champignons et poursuivre la cuisson trois minutes.

  4. Ajoutez le sucre, la sauce de poisson, l'huile de sésame, le jus de citron vert et le piment. Plongez les crevettes et poursuivre jusqu’à ce qu’elles soient cuites. Coupez le feu et rectifiez l’assaisonnement en sauce de poisson ou jus de citron pour plus de goût. Cette soupe ne doit pas être trop cuite et elle sera bonne et encore meilleure le lendemain.

  5. Ajoutez les feuilles de coriandre juste avant de servir.


Version Soupette :
Les mains de mon petit commis


  • A mon bouillon de volaille, je rajoute un bouillon de crevettes maison que je réalise avec les carcasses que mon commis d’office a délicatement pris soin de dégager au moyen de ses deux petites mains expertes.

  • Vous n'êtes plus sans ignorer ma passion des herbes aromatiques, j’accompagne la coriandre de feuilles de menthe fraiche.

  • Pour un plat plus complet, je jette une poignée de nouilles de riz complet et voilà le repas.



Mémère


Les cahiers de Mémère : Soupette Tom Yum

No stress, cette soupette est désormais consignée dans mon carnet de recettes pour votre plus riche héritage !



Ah j'oubliais...! Pour accompagner cette magnifique Soupette, je vous offre une fois encore un titre de choix issu de ma playlist.




Post Scriptum : les écrits et photos (excepté la vidéo) de ce post ne sont bien sûr qu’une fiction, dont les droits sont détenus par « A la Soupette de Mémère », et toute ressemblance avec la réalité n’est que pure coïncidence.

* Saint Exupéry, Le petit prince


  • Photo du rédacteurMémère

Dernière mise à jour : 5 oct. 2021

Chers enfants,


Une fois n'est pas coutume, vous ne l'eusses soupçonné sans doute, le Bleu est une couleur faisant partie intégrante de ma personnalité. Mais non je ne suis pas aussi froide que vous pouvez l'imaginer perchée dans mon cadre, c'est bien le feu qui bouillonne dans ma marmite interne. Yes, bleu comme la lave qui coule dans mes veines. "Fleur bleue" : cela me définit. D'aucuns diraient "cucul la praline". Tant j'ai passé toute ma vie pour le souvenir d'un instant. J'ai pour preuve ce grand chagrin d'amour pour le soldat qui m'a roulé le french kiss le plus mémorable de tous les temps. "Il était mince il était beau /il sentait bon le sable chaud, mon légionnaire..."*

Fleur bleue : l'expression tirerait justement son origine de l'Allemagne romantique où un jeune écrivain du nom de Novalis parle de "die blaue Blume der Romantik" (la fleur bleue du romantisme) où il raconte comment un poète médiéval, en cherchant un idéal, découvre la fleur bleue. Quant à mon soldat, était-il allemand ou français, peu importe, je crois qu'il était plutôt lorrain, un mélange des deux en quelque sorte. La légende raconte qu'il aurait traversé le Rhin à la nage avec son vélo sur le dos pour échapper aux travaux forcés en Allemagne. "Monsieur le Président/Je ne veux pas la faire/Je ne suis pas sur terre/Pour tuer des pauvres gens/C'est pas pour vous fâcher/Il faut que je vous dise/Ma décision est prise/Je m'en vais déserter"**...Tellement romantique... La grande naïve aurait pu croire n'importe quoi à l'époque. Bref, tout ce dont je me rappelle c'est que "c'était tout juste après la guerre, dans un p'tit bal qu'avait souffert, sur une piste de misère (...) Non, je ne me souviens plus du nom du bal perdu/Ce dont je me souviens c'est qu'ils étaient heureux/Les yeux au fond des yeux/Et c'était bien/Et c'était bien***.

Je ne vais pas vous refaire toute la playlist de ma jeunesse, je clos ici le propos d'autant qu'Il s'est évaporé dans la nature avec la Libération, après une correspondance enflammée. Par la suite j'ai rencontré Pépère, avec qui il a fallut que je me marie, mais ça c'est une autre histoire. Soit mon premier amour est parti avec une autre, soit il est parti la fleur au fusil. Bref paix à leurs âmes. Il en resté toutes les graines que j'ai semées dans mon jardin.


Les fleurs de bourrache se sont ressemées partout !

Pour me consoler, et pour vous en souvenir de votre arrière-grand père, j'ai inventé cette galette :


LA BLUETTE


Battez la pâte à galette dont je ne vous donnerez toujours pas la recette. Je peux juste vous dire que je prend une farine 100% sarrasin. Ce n'est pas si facile à faire. Vous pouvez toujours trouver des galettes natures toute faites dans le commerce, mais sachez qu'elles ne seront pas aussi bonnes que chez moi. Bien entendu, il va sans dire !

Etalez-en une louche dans la poêle bien chaude, laissez-la cuire quelques minutes avant de la retourner comme une crêpe. Cuisez-y un oeuf en miroir jusqu'à ce qu'il vous murmure que vous êtes la plus belle, saupoudrez tout autour du râpé d'emmental français. Pliez la galette en quatre comme une enveloppe renfermant une lettre d'amour, tout en laissant apparaitre l'oeuf miroir au centre. Ou en trois comme un joli lit d'épousailles...

Partez en séjour rapide en Auvergne, si pour vous l'Allemagne vous paraît loin quoiqu'il y a aussi de très bons fromages bleus là-bas. Etendez-vous-y sur la mousse puis rapportez dans votre valise un fromage bleu, bleu comme les sources qui coulent des volcans, et dont vous déposerez délicatement quelques triangles sur l'enveloppe. Rapide le séjour. Attendez qu'il fonde sous la chaleur. Le fromage bien sûr.

A l'aube descendez au potager cueillir quelques fleurs bleues qui ne vivront que le temps d'une journée et dont vous pourrez parsemer la galette : bleuets, fleurs de bourrache, fleurs de salades montées. Enfin pour le vaporeux, n'oubliez pas la petite tige chevelue du fenouil. Et pour le croquant, torréfiez quelques graines dans votre poêle qui annonceront tous les futurs petits enfants à venir.



Je n'ai pas résisté à la tentation...

Votre Émile brille par son absence de mille feux, pas d'inquiétude, Sydney le remplacera aisément. Et, fleur sur la galette, son saxophone soprano vous jouera un inoubliable "Petite fleur".

Un de perdu, dix de retrouvés, comme on dit !


Mémère

* Chanson "Mon Légionnaire", Edith Piaf

** Chanson "Le déserteur", Boris Vian

*** Chanson "Le p'tit bal perdu", Bourvil

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